— RECITS ET SOUVENIRS DES ANNES 1950-1960 —

— Skikda - Philippeville en 1856 - L.R.M. —

Voici quelques souvenirs dont certains internautes se rappellent encore sans doute. Ils seront complétés progressivement.

Skikda - Philippeville - Samedi 20 août 1955

— Skikda - 20 août 1955 —

’étais âgé de 3 ans et demi ce 20 août 1955. Plus de 50 après, j’avais parlé à mon père de vagues souvenirs de cette journée. A ma grande surprise, il me les a confirmés et apporté d’autres détails que mon jeune âge ne pouvait retenir.
Mon père qui vivait en France depuis 1953, était venu en congés à Skikda. Il m’avait emmené en promenade dans la matinée du 20 août 1955. Au cours de cette promenade, nous avions fait la rencontre d’un de ses amis qui lui a demandé où nous allions. Mon père lui a dit qu’il comptait m’emmener à la plage dans l’après-midi, et son ami, sans donner d’explications, lui a alors conseillé de ne pas sortir, se contentant de lui dire qu’il faisait beaucoup trop chaud pour moi. Nous sommes rentrés de promenade pour déjeuner, et peu de temps après, vers midi, on entendait les premiers coups de feu. Ces détails m’ont été rapportés par mon père, car je ne me souviens pas de cette rencontre.
Par contre, bien que j’étais âgé de 3 ans et demi, je me souviens des détonations qui venaient de la ville. Nous habitions au 60 de la rue des Aurès (un numéro qui donnait sur plusieurs habitations). Le bruit des détonations étaient très audibles car la rue des Aurès (aujourd’hui rue des Frères Allouche), se trouve sur les hauteurs de la ville. Cela a duré les jours suivants. Ces rafales venaient sans doute du stade où avaient lieu les exécutions sommaires.
J’étais trop jeune pour mesurer la gravité des évènements et du drame qui se déroulait, mais je sentais l’émoi et l’anxiété des adultes que ces fusillades avaient provoqués.
Je ne saurais dire si c’était le lendemain ou l’un des jours suivants, mon père est allé en ville, je l’accompagnais là encore, et j’ai nettement en mémoire le désordre et la désolation qui régnaient dans les rues, comme on sait, ce 20 août était jour de marché.
Toujours lié à ces évènements, des soldats sont venus au 60 de la rue des Aurès et ont réuni tous les hommes. C’est mon père qui a parlementé avec l’officier qui les commandait. Cet officier était originaire de la région où vivait mon père en France, et finalement les militaires sont partis sans emmener personne. Lors de la vérification de son identité, mon père qui était cadre civil dans une base militaire américaine de Châteauroux, avait donné sa carte d'identification délivrée par les autorités américaines de l'US Air Force. La vue de ce document avait été un élément supplémentaire pour que les militaires n'insistent pas davantage.
Malheureusement, cela ne s’est pas toujours passé ainsi ce 20 août 1955, et nombre d’Algériens qui ne faisaient pas partie des assaillants, et dont le seul tort était de se trouver en ville pour le marché, ont été raflés et exécutés sommairement. Sans parler de ceux ramassés les jours suivants et qui ne reverront jamais les leurs.
Les années qui suivirent, bien des fois des militaires reviendront pour des fouilles dans les maisons, mettant sens dessus dessous les habitations. Presque à chaque fois, les hommes seront regroupés, mais ces fois-là, c’est ma grand-mère paternelle, qui parlait un français très correct, qui fera office d’interprète. Autant que je m’en souvienne, aucune personne n'a été inquiétée.

La neige sur Skikda en février 1956

— Skikda sous la neige - Février 1956 —

La vague de froid qui s'est abattue sur l'Europe et l'Afrique du Nord ce février 2012 me rappelle celle qui a sévi en février 1956. C'était un des hivers les plus rigoureux que l'on ait connu en Algérie. Skikda était couverte de neige.
Si la neige est fréquente dans certaines régions d'Algérie, elle l'est rarement à Skikda qui est une ville côtière bénéficiant d'un climat généralement doux. Cette neige de l'hiver 1955-1956 est restée dans les mémoires. J'allais avoir 4 ans ce mois de février 1956, et je me souviens de cette première neige et d'un oiseau mort trouvé près de chez moi, mais curieusement, je ne me souviens pas du froid.
La fonte des neiges provoquera des inondations dans le Faubourg de l'Espérance et du côté de l'Oued Saf-Saf, ainsi que des glissements de terrains et éboulements sur la route de Jeanne d'Arc (Larbi Ben M'hidi).

Souvenirs de l'école Anatole France

— Skikda - Cour de l'Ecole Anatole France de la rue des Aurès —
(aujourd'hui Ecole El Farabi, rue des Frères Allouche)

'école s'appelait à l'origine "Ecole Indigène de Garçons". Mon père qui avait fréquenté cette école dans les années "trente", ainsi que mes oncles paternels et maternel, m'avait dit que ce nom était inscrit sur le fronton de l'école, avec des caractères stylisés qui imitaient l'écriture arabe. Par la suite, baptisée Ecole Anatole France, écrit en mosaïque sur le fronton, cette école sera surtout connue sous le nom d'école "Cianfarani" du nom de son premier directeur. Sur la photo, une vue partielle de l'école ; au fond de la cour de récréation, les trois arcades qui s'ouvraient sur la salle de cantine, une pièce qui servait parfois de salle de projection ; au-dessus le logement du directeur ; espace couvert à droite et latrines à gauche. C'est devant l'entrée de la cantine, que les photos de classes seront prises.

De temps en temps, nous avions droit à une projection de film. Nous découvrions alors les films comme "Crin Blanc", des "Laurel et Hardy", la série des "Bomba" (une sorte de fils de Tarzan) avec Johnny Sheffield, des westerns, etc.

L'école était dirigée par une équipe compétente, avec à sa tête le sévère directeur M. Othman Djadoun et la concierge Mme Petagna. Les instituteurs : Mme Bougliani (Bocognani?) qui avait eu également mon père comme élève, M. Fortunato, M. Criscuolo, Mme Gouci, et M. Kamel Sarroub, qui me laisse le souvenir d'un instituteur attachant et soucieux de nous faire progresser. Mme Gouci avait été remplacée en cours d'année scolaire 1961-1962 par M. Kamel Sarroub qui sera mon dernier instituteur en Algérie, puisque mon père était venu me chercher pour m'emmener en France en août 1962.
D'autres instituteurs : M. Peï-Tronchi, M. Gouci, M. Granger, M. Khodja...

— Skikda - 1961-1962 - Ecole primaire Anatole France (Actuelle Ecole El Farabi) —
(au centre, Kamel Boussaboua)
- Voir la photo complète dans la page des photos de classe de l'école Anatole France -